La corde et le pendu
Dernière mise à jour : 11 mai 2020

D’ici quelques semaines à peine, les citoyens français – ou, du moins, une partie d’entre eux – se rendront aux urnes. Mais avant de voter sur un programme, l’élection présidentielle – voulue par un général à la retraite en soif d’aventure et de gloriole – est avant tout le choix d’une personne. Et vu le choix, les Français accueilleront l’élection du prochain président – ou de la prochaine présidente – avec autant d’enthousiasme et de plaisir qu’un jeune de banlieue peut espérer accueillir une matraque de CRS.
À gauche, les deux candidats les plus en vue – on oubliera d’office les nains politiques qui se battent encore sur le mode de trotskisme ou de marxisme-léninisme à appliquer après un grand soir aussi attendu que la transmutation du plomb en or – ressemblent surtout à un vieux couple se partageant le même lit et la même couverture trop étroite, chacun tentant désespérément de la ramener à lui lorsque l’autre se retourne. Tous deux rivalisent d’idées absurdes et de promesses impossibles pour tenter d’amadouer les électeurs, probablement dépités par ce conflit d’égos. Car, si leur but affiché est d’instaurer une égalité parfaite dans la société, comme le dirait Orwell, ils rêvent surtout chacun d’être plus égal que les autres.
À droite, le tableau n’est guère plus reluisant. Si la primaire populaire a pu ressembler à un succès, la situation a rapidement dégénéré. Empêtré dans une affaire d’emploi fictif, le candidat a successivement démenti, puis reconnu en affirmant que ce n’était pas grave car tout le monde le faisait, puis, finalement, admis que c’était inacceptable et qu’il fallait reprocher ce comportement à l’ensemble de la classe politique. Ce faisant, il a considéré que la simple reconnaissance de sa culpabilité morale devait suffire, n’en déplaise à la justice et à ses engagements précédents. Lui confier les bourses de l’État parait donc aussi sensé et raisonnable que de réintroduire un pédophile dans un cours de catéchisme.
Les mêmes accusations d’emplois fictifs éclaboussent, un peu plus à droite, la candidate auto-proclamée des ouvriers et de la démocratie, depuis le château de son père – qui a eu le bon goût de lui céder également son parti. On constate là que l’évolution n’est pas forcément synonyme de progrès : au Moyen-Âge, les châteaux regorgeaient de princesses attendant qu’un chevalier vienne de loin pour les délivrer ; de nos jours, il s’agit de harpies souhaitant que ces gueux retournent chez eux dès qu’on n’en a plus besoin – voire avant.
Le tableau ne serait pas complet sans parler des autres candidats, petits ou grands, qui considèrent que leur candidature les a transformés en messies d’une nouvelle génération de croyants et promettant de faire couler le lait et le miel sur toute la Terre – c’est si simple dans leur bouche qu’on se demanderait presque quel était l’anorexique vegan qui nous en avait privé jusqu’ici…
Demander aux Français de choisir leur président parmi ces guignols est aussi cynique que de demander à un pendu de choisir la corde qui le fera passer dans l’autre monde. Mais la faute n’est pas tant à ces candidats de pacotilles qu’à un système qui concentre les pouvoirs au lieu de les disperser pour en prévenir l’abus. Alors, ce qu’on peut souhaiter de mieux à l’hexagone serait sans doute de ne plus avoir de président. La Belgique avait tenté l’expérience de se priver de gouvernement durant 541 jours – avec un succès qui devrait faire réfléchir les partisans bornés de cette monarchie républicaine…
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